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ÉTUDES MAÇONNIQUES

par le Vén. Frère LEON ZELDIS
Ex-adjoint du Grand Maitre de la Grande Loge de l’Etat d’Israël.

LA FRANC-MAÇONNERIE UNE PERTE DE TEMPS ?

 

Permettez-moi de commencer par répéter cette déclaration catégorique : la Franc-Maçonnerie est une perte de temps. Mais, attendez un moment avant de supprimer ce message. Avant de le faire, je vous invite de considérer plus soigneusement ce que je veux dire par dire par cette déclaration.

 

Que veut dire : « Perte de temps » ? A première vue, on pense à une simple affirmation ; qu’en pensez-vous ?

 

Afin de ne pas trop prolonger ce petit travail, je propose cette définition : Perdre son temps est de l’employer pour faire quelque chose d’inutile ou de ne rien faire du tout. En d’autres termes : tuer le temps. Les Psychologues diraient n’est pas un meurtre mais plutôt un suicide.

 

Revenant sur ces derniers mots, la seconde affirmation n’est pas applicable pour nous. Nous faisons bien quelque chose mais ce n’est sûrement pas pour accumuler de la poussière. C’est donc la première possibilité qui compte pour nous : nous faisons quelque chose….d’inutile.

 

Alors jaillit une nouvelle question : que signifie « inutile » ? En d’autres mots, quand une activité est-elle « utile » ?

 

Ici, nous mettons les pieds dans un champ miné de philosophie. Mais n’ayez crainte car je ne vais pas suivre l’avis de Bertrand Russell, qui dit  que, pour un philosophe, écrire quelque chose de compréhensible est un suicide.

 

J’ai mentionné le mot de suicide par deux fois mais. Puisque nous n’avons aucunement l’intentions de commettre un suicide, nous devons commencer par définir ce qui est utile jeter un coup d’œil sur cette doctrine qui considère que comme toutes les doctrines philosophiques, est utile seulement ce qui est utilitaire.

 

Voyons maintenant ce que dit un dictionnaire philosophique sur le terme « Utilitarisme ». Utilitarisme affirme que l’utilité est placée au-dessus de toutes les valeurs. Autrement dit, que rien n’a de valeur s’il n’est utile.

 

Plus loin, le dictionnaire explique que l’utilitarisme affirme que, dans la nature, tout  est ou bien avantageux ou bien nuisible.

 

Le philosophe anglais Jeremy Bentham, remplacera le terme « plaisir » par le mot « utile ». Ce qui  signifie que tout ce qui nous donne du plaisir ou nous évite de la peine, est utile. Son successeur Mill, autre philosophe anglais, affirme qu’il y a plusieurs degrés de plaisir que le plaisir intellectuel ou affectif est supérieur aux plaisirs physiques. Le problème trouve sa réponse en affirmant que, par exemple,  écouter de la belle musique  donne plus de plaisir que de déguster un bon repas, ou de faire l’amour avec une belle femme. Je ne voudrais pas continuer avec de telles comparaisons et je sais que Mill avait écrit ces lignes quand il avait 55 ans âge qui, à cette époque, était considéré comme avancé pour avoir des capacités exceptionnelles dans ce domaine.

 

Tout ceci est plutôt abstrait. Revenons donc sur la terre. Quand nous disons que quelque chose est utile pour nous, nous y gagnons quelque chose. Le profit peut être un gain matériel ou l’effet d’un médicament qui calme notre douleur.

Il peut aussi être immatériel comme celui de gagner des bons amis.

 

Dans cet ordre d’idées, nous pouvons mesurer le plaisir que nous donne le fait d’aller à une réunion de notre  Loge, de nous y a asseoir pour écouter une conférence, ou de participer à une cérémonie, de mettre notre obole de le Tronc de la Veuve et finalement de rentrer chez nous après avoir partagé le pain et le sel avec nos Frères.

 

Où réside le profit dans tout cela ?

 

En Loge, nous ne gagnons pas d’argent, ne faisons pas d’affaires et n’attendons aucun avantage l’un de l’autre et, je peux affirmer que nous n’éprouvons aucun plaisir physique à rester assis pendant plusieurs heures sur une chaise dure.

 

Ne serait-il pas plus plaisant de nous prélasser  dans un bon fauteuil devant la télévision ou son computer, buvant un bon verre, écoutant un de la bonne musique ou lire un roman policier ou un ouvrage plus sérieux ?

 

Ceci est certes plus plaisant, donc plus utile.

 

Je pense cependant qu’on peut apercevoir une lueur d’espoir que tout n’est pas perdu.

 

Regardons donc : quel est le but de notre institution ? Nous disons que la Franc-Maçonnerie a pour but de prendre des hommes bons pour les rendre meilleurs et,  avec eux, améliorer la société humaine d’atteindre l’idéal d’une humanité sage et tolérante où  la fraternité devient un lien universel entre tous les êtres humains.

 

Ces objectifs sont-ils utiles ? Nous devons supposer qu’ils le sont même s’ils ne peuvent pas être atteints dans un certain temps et sous certaines conditions d’environnement.

 

Revenons maintenant au sujet de l’utilitarisme. Il n’y a pas de doute que la haine, les guerres, les conflits, le terrorisme ne peuvent pas donner du plaisir. Seuls des individus atteints de maladies mentales peuvent trouver une satisfaction à assassiner des enfants. Des personnes normales ne peuvent prendre de joie à voir souffrir les autres.

 

Par conséquent, tout ce qui contribue à arrondir les coins, à faire disparaître les aspérités entre les gens, et d’augmenter la fraternité est ipso-facto positif et donc utile.

 

Je suis en train de contredire mes premières affirmations. C’est dangereux, mais continuons tout de même !

 

Examinons certaines autres activités de notre vie quotidienne. .Est-il utile, par exemple, d’aller à un stade pour assister à un match de football ? Non seulement, ceci ne nous apporte aucun profit matériel – nous ne gagnons rien – par contre, nous devons payer nos tickets d’entrée. Quel profit tirons-nous de là ? Quelque chose d’immatériel, le plaisir de voir notre équipe gagner ou bien, si les adversaires gagnent, souhaiter qu’ils aillent au diable.

 

Rappelons que nous considérons que la victoire des nôtres est due à leur suprématie, mais celle des adversaires est uniquement un effet de chance.

 

Examinons d’autres activités. A quel point est-il utile de lire un bon livre ou de regarder un programme de télévision ? Ne devons-nous pas répondre que leur utilité est en proportion avec le plaisir ou la satisfaction qu’ils nous apportent. Ceci signifie que nous acceptons la proposition de Bentham que nous avons mentionnée plus haut.

 

S’il en est ainsi, il y a bon nombre d’activités que nous pouvons citer, comme aller au cinéma ou au théâtre, au concert, faire des achats, aller à l’église et finalement, d’aller au cimetière. Certains m’ont dit qu’ils ont assisté aux funérailles de tous leurs amis, afin d’être sûrs qu’ils viendront au leur.

 

Tous ces exemples, nous permettent d’affirmer que nous perdons du temps à moins d’accepter que l’utile est égal au  plaisir.

 

Il y a cependant d’autres activités comme tricoter une écharpe, aller chez le coiffeur, cirer ses souliers ne peuvent être considérés comme utiles. Il n’y a aucune obligation morale de se faire couper les cheveux et je ne crois pas que ça fasse plaisir. Néanmoins, nous le faisons quand même  et perdons donc du temps.

 

Le temps, mes T.C.F. est la seule chose irremplaçable et, malgré ça, nous le perdons jour par jour, heure par heure, minute par minute.

 

Revenons maintenant à notre problème vu du côté pluraliste. En effet, je me suis exprimé uniquement à un point de vue individuel et ai ainsi commis une erreur primordiale, ayant momentanément omis de parler du reste du monde, la famille, l’environnement humain dans lequel nous vivons, de la société à laquelle nous appartenons.

 

Examiné sous un angle plus large, le problème est plus compliqué. Certaines actions pourraient ne pas être utiles pour les individus, mais le sont bien pour la société.

 

Un exemple fort simple est celui du soldat qui risque sa vie pour protéger son pays.

Il n’y a aucun plaisir de patrouiller au long de la frontière, assis dans un tank mais on le fait parce que c’est utile pour la patrie qui englobe notre famille qui à son tour, nous englobe tous. Nous avons ainsi un exemple de quelque chose qui est utile mais ne fait aucun plaisir.

 

En ce qui concerne notre Loge, je ne sais pas  si l’exécution parfaite d’une cérémonie, une initiation par exemple, provoque du plaisir. Je crois qu’elle le fait.

Tout comme de faire parfaitement une tâche qui nous est confiée. C’est aussi le plaisir de l’artiste qui achève son œuvre, du musicien qui est satisfait de son exécution si elle est parfaite.

 

Il y a autre chose encore. Nous écoutons des conférences – pas celle-ci nécessairement -  et nous en apprenons quelque chose. Un philosophe a dit que, quand la raison s’élargit pour ajouter une nouvelle connaissance, il ne se rétrécit plus jamais pour revenir à sa taille première. En élargissant notre horizon mental, nous pouvons atteindre même un coin de l’inconnu. Ceci, mes Frères, c’est de la philosophie et comme le disait Bertrand Russell, la science, c’est ce qu’on connaît, et la philosophie c’est ce que nous ne connaissons pas.

 

Si nous tenons compte seulement du matériel, nous perdons  effectivement notre temps, mais si nous considérons notre avoir mental, nous contribuons au bonheur de la société et au progrès de notre pays. C’est ainsi que je confesse que je me suis trompé en donnant ce titre à mon travail. Peut-être n’était-ce pas involontairement !

 

J’arrive à la fin de ma conférence. On m’a dit que, si dans une vingtaine de minutes on n’a pas réussi à exprimer ses idées, il vaut mieux écrire un livre.

 

Le message que j’ai voulu exprimer avec ce travail est bien simple : Il dépend uniquement  de nous-mêmes que, oui ou non, nous perdions du temps en Franc-Maçonnerie. Que chacun de nous fasse son devoir afin que nous ne puissions jamais croire que nous avons perdu notre temps.

 

(Traduction française par Mehmet Fuat Akev – Octobre 2008)